Le chantier est gigantesque. Après la réforme du droit des contrats, le législateur va s’atteler à la réforme du droit de la responsabilité civile et notamment au régime de responsabilité des accidents de la circulation routière.
L’objectif affiché par le Garde des Sceaux est « de moderniser, de clarifier notre droit positif et de l’enrichir de deux siècles de jurisprudence et de doctrine » mais également de « remédier aux iniquités qu’a pu engendrer la mise en œuvre de ces dispositions âgées maintenant de 30 ans déjà. »
La garde des sceaux avait d’ailleurs cité le Doyen Carbonnier évoquant le régime de responsabilité civile : « Cette partie du code civil s’est hypertrophiée […] Les dommages se sont multipliés : la vie urbaine nous jette les uns sur les autres, les machines explosent, l’inflation des lois fait foisonner les manquements à la loi. Et en face les victimes sont devenues plus exigeantes».
Le projet devrait d’abord consacrer le principe jurisprudentiel de la réparation intégrale du préjudice (article 1258 du projet) puis consacrer également les modes de réparation (en nature ou par l’octroi de dommage-intérêts).
Les réparations des préjudices futurs et de la perte de chance devraient être enfin codifiés, ce qui est une vraie innovation.
L'indemnisation des victimes d'accidents corporels devrait être en outre renforcée. En effet, le projet souhaite consacrer des règles propres à réparation du préjudice corporel avec notamment :
- l'adoption d’une nomenclature des postes de préjudices (semblable à la nomenclature dite « Dintilhac » ;
- l'instauration d'un barème médical d’invalidité et d’un barème de capitalisation des rentes.
- la création d'une base de données jurisprudentielles afin que les victimes d’accident puissent situer précisément l’évaluation de leur préjudice;
- la création d'un référentiel d’indemnisation indicatif régulièrement réévalué.
Concernant l’indemnisation des victimes d'accidents de la circulation, le champ d’application de la loi Badinter (loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation), devrait être étendu aux trains et tramways circulant sur une voie qui leur sont propres.
Enfin, innovation importante et bienvenue : le sort des conducteurs de véhicule victimes devrait être amélioré : La faute du conducteur, sauf faute inexcusable, ne devrait plus lui être opposable.
Le nombre d’accident de la circulation n’a cessé d’augmenter dans les grandes villes (passant à Marseille de 971 en 2009 à 2257 en 2016), engendrant une augmentation du nombre de contentieux de l’indemnisation conséquente, avec des décisions rendues en terme d’indemnisation souvent inégales.
En outre, l’évolution technologique (avec l’apparition des voitures autonomes par exemple) a complexifié les contentieux relatifs aux accidents de la route. Cette évolution est constante et engendrera nécessairement de nouvelles problématiques.
Le législateur souhaite donc d’une part codifier des règles pour la plupart d’origine prétorienne et d’autre part doter le juge d’outils plus clairs afin d’harmoniser les décisions rendues et de renforcer l’indemnisation des victimes d’accidents.